« transfriendly » engagée

La jeune Bruxelloise, Master en Droit à finalité Droit public et international, est plutôt hyperactive. L’ancienne présidente du Cercle de Droit a remporté le concours de plaidoirie de la Croix Rouge. Elle est aussi une pierre angulaire du projet d’accueil des personnes transgenres mené par l’ULB et l’Equality Law Clinic. Rencontre.

Esprit libre : Qu’est-ce que l’Equality Law Clinic (ELC) et comment y êtes vous arrivée ?
Justine Bolssens :
L’ ELC est un centre de recherche qui travaille sur le droit fondamental de la non-discrimination. Au travers du projet qui m’a été confié, l’inclusion des personnes transgenres à l’ULB, j’ai pu participer à la vie étudiante et à la diversité à l’ULB. Pour certains étudiants de droit, sélectionnés par les professeures afin de créer un groupe varié et complémentaire, c’est notre lieu de stage. Mon atout, je crois, était qu’en plus d’être très motivée j’ai une bonne connaissance de la vie étudiante et du folklore à l’ULB. Tous les projets de l’ELC sont supervisés par Emmanuelle Bribosia et Isabelle Rorive et, cette année, par Chloé Leroy (coordinatrice de l’Année des diversités).

EL : C’était effectivement l’Année des diversités à l’ULB, qu’est-ce que cela vous inspire ?
JB :
Je suis ravie que l’ULB aborde des thématiques comme celle des diversités. Non pas juste l’aborder, mais lui réserver toute une année. C’est important qu’à la fois l’Université garde sa mission principale qui est l’enseignement et ne s’éparpille pas dans trop de combats mais qu’elle puisse également réaliser des projets concrets qui améliorent la vie des étudiants et promeuvent une certaine liberté. L’ULB est remplie d’une multitude de personnes très actives et qui sont capables de grandes choses. Quand je vois le CV de certains de mes professeurs en droit je suis d’ailleurs impressionnée. Je pense que c’est bénéfique de profiter des idées et des intellects présents dans cette Université. J’ai trouvé que l’ULB avait mené énormément d’événements autour de cette thématique des diversités qui étaient exceptionnels, notamment le festival Bruxelles Libre Culture.

Je suis fière de mon université quand je vois les initiatives qu’elle prend.

EL : Selon vous, cette année a-t-elle permis des avancées en matière de diversités ?
JB :
C’était une bonne dynamique pour les années futures car beaucoup de projets ont été lancés et ont rassemblé beaucoup de personnes. On a ouvert un livre sur les diversités en mettant ça sur tous les plans mais il faudra, par la suite, garder ce livre ouvert et avancer sur tout ce qui a été dit, sur tout ce qui a été fait. Je suis assez fière de mon Université quand je vois les initiatives qu’elle prend.

EL : Comment s’est déroulé votre projet sur l’accueil des personnes transgenres à l’ULB ?
JB :
L’année passée, des étudiants travaillaient déjà à l’Equality Law Clinic sur le sujet. Ils avaient déjà fait un énorme travail sur le sujet. Quand j’ai commencé à travailler sur le sujet, l’ULB avait déjà mis en place la possibilité pour les personnes transgenres de choisir un prénom préférentiel.

EL : Qu’est-ce qu’il restait à faire ?
JB :
Le prénom préférentiel à l’ULB est une belle avancée mais elle est arrivée vite, ce qui a entraîné quelques petits défauts. J’ai eu l’occasion d’en discuter avec des personnes transgenres qui m’ont fait part de certaines difficultés rencontrées à l’ULB. Cette première expérience permet justement de travailler sur ces démarches et de les améliorer. L’ULB tente d’inclure au maximum toutes les personnes minorisées et ce projet vise spécifiquement à créer un environnement « transfriendly ». Dans un futur proche, notre travail sera donc de faciliter les démarches pour les personnes transgenres, qui ne savent pas toujours vers qui se diriger ou comment faire leurs demandes.

EL : C’est un travail fastidieux ?
JB :
Oui c’est un gros travail car il faut se coordonner avec de nombreux services et c’est ce sur quoi on travaille en ce moment : réfléchir au parcours d’un étudiant transgenre et qu’il y ait, à chaque étape, non pas quelque chose de réservé aux personnes transgenres mais quelque chose qui les prend en compte. La situation des étudiants transgenres est encore souvent méconnue pour beaucoup de personnes et il est donc parfois difficile pour quelqu’un qui doit prendre en compte ces demandes de s’y retrouver. Durant cette année, on a voulu, avec l’ULB, travailler sur la méconnaissance de cette question.

EL : Quels sont les plans pour le futur ?
JB :
Un des projets que j’ai proposés _ mais qui est encore au stade de la discussion _ serait la création de toilettes non-genrées. On ne parle ici pas du tout de toilettes réservées aux personnes transgenres mais juste de faciliter la question transgenre vis-à-vis du modèle binaire de notre société. Certes certaines choses sont plus difficiles à « débinariser » mais, de mon point de vue, des toilettes ne devraient pas être un problème. C’est un acte symbolique, parce qu’il ne va pas changer du jour ou lendemain la vie des personnes transgenres mais c’est avec ce genre de petites choses qu’on arrivera à ce qu’elles se sentent plus acceptées. L’Equality Law Clinic a participé avec de nombreuses universités et associations à la rédaction d’un guide d’accompagnement des personnes transgenres dans l’enseignement supérieur en Fédération Wallonie-Bruxelles avec énormément de recommandations; donc j’imagine que l’ULB essayera de les mettre en œuvre et de terminer le travail enclenché sur l’utilisation du prénom préférentiel.

EL : Un mot pour la fin ?
JB :
Ce qui est intéressant c’est que les questions relatives à l’accueil des personnes transgenres qui se posent à l’Université sont finalement le reflet de celles posées dans la vie de tous les jours. Et en travaillant sur ces questions, l’ULB se positionne et avance sur le bon chemin.

Mis à jour le 5 novembre 2019